JUILLET 2019


Le départ approche et la tristesse s'agrandit. Oui. Je ne veux pas quitter ces regards, ces sourires. Et puis il y a toutes ces rencontres, celles parfois si brèves mais qui nous marquent. Et dans cette multitude de rencontres, il y a des amitiés, des amours, une famille. C'est une découverte constante. Tout est question de première fois, de nouveaux repères. C'est un voyage constant. Je n'ai pas voyagé de villes en villes ou de pays en pays mais de rencontres en rencontres. Il y a eu des regards, beaucoup de regards, dans ces regards des sourires, puis il y a eu des paroles aussi, des mots, parfois juste un seul, et des conflits, de ceux amicaux, de ceux amoureux. La France a eu ses premières fois, le Cambodge les a aujourd'hui !

Je me prépare au départ - aux retrouvailles, mais surtout aux études, au travail qui m'attend. J'ai eu mes obligations au Cambodge, mais elles étaient de coeur, de pensée. Et si des gens ont pu dire que ces drama workshops étaient humanitaires - ou bien que le Cambodge dans ma vie serait le temps d'un voyage ou peut-être deux .... Et bien non, ce n'est pas vrai ! Je n'ai pas choisi de faire du théâtre ici pour la pauvreté, mais pour les gens, pour les instants passés avec eux - instants d'une simplicité non retrouvée en France ou alors plus rarement.

Je me demande souvent si je pourrais vivre au Cambodge. Je ne sais pas. Cela dit, si j'ai tenu neuf mois alors pourquoi pas douze et peut-être plus ! Mais quand la question se pose pour la France, je me dis que c'est impossible. Que la vie française m'est trop pénible. Et pourtant j'aime la France. J'aime les repères que je m'y suis fait. J'aime son pain. J'aime ses cafés. J'aime son vin blanc aussi. J'aime bien lire dans les trains. Et puis j'aime surtout voir ma famille et mes amis. Mais j'aime aussi croiser quotidiennement le regard des khmers, et la simplicité d'un grand nombre d'entre eux. J'aime la lenteur de Bakong, la force de ces gens, leurs volontés si fortes et nécessaires pour pouvoir boire, pour pouvoir manger mais aussi pour pouvoir respirer. Cette pauvreté ou un retour à l'essence même de l'être humain. Et dans cette pauvreté, il y a aussi la jeunesse. C'est une jeunesse qui lutte, à la recherche de savoirs perdus.

Beaucoup de personnes se disent étonnées de mon parcours et de mes actes. Mais quand je regarde le quotidien de mes amis, le mien n'est rien ! Je ne pars pas de nulle part. Je viens de la ville et eux de la campagne. Mes parents ne sont pas analphabètes. Mes parents vont au théâtre, au cinéma, aiment la littérature. Je ne suis pas fille de paysans comme grand nombre de jeunes ici. Je ne suis pas riche, mais je ne vis pas dans leur pauvreté. Du Cambodge à la France, leur pauvreté ne fait que s'empirer alors que la mienne s'atténue et disparait.

Le Cambodge, c'est aussi l'entraide. Peut-être pour aller mieux, peut-être avoir plus ... La politesse n'est pas la même. On ne dit pas bonjour. On ne dit pas merci. On ne dit pas au-revoir. On fait c'est tout. Mais quand j'ai demandé à Long ce qu'était leur politesse à eux. C'est le sourire qu'il m'a dit. 

Il y a presque un mois de cela, les médecins m'ont hospitalisée dans le cadre d'une suspicion d'appendicite. Rien de grave juste de l'attente - cinq jours seulement. Dans ces cinq jours, j'ai eu une chance énorme. Celle de n'être jamais seule. Les visites étaient constantes, souvent nombreuses - parfois cinq à six dans la chambre d'hôpital et trois personnes différentes pour dormir près de moi. Après tout ça, tout ces moments, il n'y a qu'une question qui me vient à l'esprit : comment pourrais-je partir et ne jamais revenir ? 

Commentaires

  1. Coucou Ambre,
    Mais oui, bientôt le retour ... tout au moins pour quelques mois, c'est mon ressenti quand je te lis !
    Je ne sais trop que penser, et je ne voudrais en aucun cas influencer ton choix, mais le Cambodge c'est bien loin !
    Je te fais de gros bisous et peut-être te verrais-je lors de ton retour en France ?
    La tua nonna

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